Inclusion financière : comment Oikocredit sélectionne-t-il ses partenaires ?
Plus de 1,4 milliard de personnes n'ont pas accès aux services financiers de base dans le monde à l’âge adulte ; et la majorité d'entre elles sont des femmes. L'inclusion financière vise ainsi à créer des opportunités pour ces personnes "non bancarisées".
L'une des approches consiste à donner accès à des prêts, souvent accompagnés d'une formation et d'un soutien aux entreprises. Et même si le prêt est modeste, l'impact peut être important : il peut permettre aux emprunteurs de démarrer ou de développer une entreprise, de cultiver une ferme, d’offrir un accès à l’éducation à leurs enfants ou de traverser des crises causées par des catastrophes naturelles ou des maladies.
Dans les années 1970, Oikocredit a commencé à accorder des prêts à des organisations actives dans le domaine de l'inclusion financière. Aujourd'hui, la coopérative compte plus de 300 entreprises partenaires dans ce secteur à travers l'Afrique, l'Asie, l'Amérique latine et les Caraïbes. Dans cet entretien mené par Ute Stefanie Haak en juillet 2023, Dave Smit, directeur des investissements à impact chez Oikocredit, donne un aperçu de la collaboration avec ces partenaires.
Selon le site Internet, "Oikocredit est convaincu que l'argent peut rendre service. Il peut offrir des opportunités aux gens et avoir un impact positif". Oikocredit réalise cet impact avec l'aide de ses partenaires. Quels sont les critères utilisés par Oikocredit pour sélectionner ces entreprises ?
Le choix des partenaires est un point très important pour Oikocredit. De la première poignée de main au contrat final, il peut s'écouler un certain laps de temps, justifié par la rigueur avec laquelle nous sélectionnons nos partenaires.
Pour garantir une diligence raisonnable, Oikocredit utilise deux tableaux de bord. Le premier est le PVR (Project Viability Risk ou risque de viabilité du projet), qui évalue les performances financières de l'entreprise.
Le second est le tableau de bord environnemental, social et de gouvernance (ESG), qui analyse l'impact environnemental et social et la gouvernance d'un partenaire potentiel. Oikocredit prend en compte sept facteurs importants, dont la prévention de l'endettement des clients finaux et la garantie d'une tarification équitable et transparente. Ces critères et principes de protection sont basés sur les meilleures pratiques internationales et les normes du marché de l'investissement d'impact.
On comprend donc pourquoi le processus est long...
Ce long processus n'est pas un frein car Oikocredit et ses partenaires entretiennent généralement des relations durables. Nombre d'entre eux bénéficient de plusieurs prêts de façon ponctuelle, et les relations de travail actives dépassent souvent la décennie. Le partenaire avec lequel Oikocredit entretient la relation la plus longue est Banco Pyme de la Comunidad en Bolivie. En effet, nous avons approuvé le premier prêt en juin 1990, il y a donc 33 ans.
En ce qui concerne les clients des entreprises partenaires, Oikocredit vérifie-t-elle qu’ils bénéficient d’impacts sociaux positifs ?
Absolument. Oikocredit contrôle systématiquement cet aspect en utilisant le tableau de bord ESG. La performance sociale est évaluée au début de la relation, et les progrès sont suivis sur une base annuelle pendant toute la durée du prêt. Ce retour d'information est essentiel pour mesurer l'impact social de notre travail commun. Oikocredit dispose d'une équipe dédiée : l'équipe chargée de la stratégie sociale et de l'impact social. En somme, le suivi et l’évaluation relèvent de la responsabilité conjointe des équipes régionales et de l'équipe chargée de la stratégie sociale et de l'impact social.
Pouvez-vous nous donner un aperçu du travail de cette équipe ?
Nous sommes en échange constant avec nos partenaires dans le monde entier. Par exemple, l'année dernière, nous avons mené une enquête auprès des clients finaux en collaboration avec 19 partenaires et autres organisations. Nous avons interrogé 16 500 clients et avons posé 30 questions dans les langues locales axées sur leur bien-être, l'impact du financement et les effets du changement climatique.
L'enquête a donné des résultats intéressants : 90 % des clients finaux ont répondu “Oui, le prêt que j'ai obtenu indirectement d'Oikocredit a eu un effet positif sur mon bien-être”. Nous trouvons ce retour d'information très important. À ma connaissance, Oikocredit est le seul investisseur d'impact à réaliser cette enquête auprès des clients finaux. Nous prévoyons de refaire l’enquête cette année, en impliquant plus de 30 partenaires.
L'enquête auprès du client final permet-elle de surveiller les effets secondaires négatifs potentiels ?
Bien sûr. Nous avons constaté qu’environ 10 % de clients qui n'ont pas perçu d'effet positif. Grâce aux résultats de l'étude, nous visons à réduire ce nombre en développant de nouveaux produits ou de nouvelles initiatives. Par exemple, en Équateur, les personnes interrogées ont indiqué qu'elles disposaient parfois d'argent liquide, mais qu'elles ne disposaient pas d'un endroit sûr pour le conserver pendant une courte période. Sur la base de ces informations, notre partenaire a mis au point un produit d'épargne à court terme spécial pour répondre à ce besoin.
Rencontrez-vous régulièrement vos partenaires en personne ?
Oui, les réunions régulières en direct avec nos partenaires font partie intégrante de notre collaboration. Elles nous permettent de renforcer nos relations et de mieux comprendre leurs opérations et leur impact sur le terrain. Au cours des deux derniers mois, je me suis rendu en Côte d'Ivoire et en Inde pour rencontrer mes partenaires et avoir un aperçu direct de leur travail et du contexte local. Ces visites contribuent à resserrer les liens et nous permettent de travailler ensemble plus efficacement. Les prochains voyages en Amérique latine et au Nigeria sont en préparation.
Merci pour cet entretien !
Merci de m'avoir donné l'occasion de donner un aperçu du travail de qualité que nous essayons de réaliser avec Oikocredit.
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